Deuxième tentative pour moi sur l'Echappée Belle Traversée Nord, dont le début a été modifié avec l'ajout du Col de la Valloire et la réduction du Col de Morétan pour un total de 83 km et 6200 mD+. Globalement ça s'annonce plus difficile, et encore plus beau !
Le nouveau profil |
Cette course est dure, sur le papier elle n'est pas faite pour moi,
mais elle me plait, et ma prestation de l'an dernier m'a donné l'espoir
de pouvoir la dompter. Alors j'y suis retourné.
Les photos - Le film - La trace
Avant la course
La préparation n'a pas été idéale. J'ai gardé une structure semblable à l'année dernière mais mes disponibilités limitées m'ont fait rater les offs les plus importants et ne m'ont pas permis d'aller courir en montagne et de faire au moins une course de préparation comme j'avais pu le faire sur le Trail du Cenis en 2020. En plus l'Ultra Pilatrail a été annulé. Pour autant je reste confiant sur mon foncier.
Vendredi 20 août, j'embarque avec Xavier dans la voiture de Benoît en direction d'Aiguebelle où je plante ma tente, mange ma salade de pâtes, et me couche de bonne heure (20h45 !). Le bruit du dehors ne me gêne finalement pas très longtemps et je dors par saccades jusqu'à la sonnerie du réveil à 2h15.J'ai l'impression que le sommeil a été finalement assez bon. Je prends le temps de préparer mes affaires et de manger un peu avant de me présenter à 3h15 devant la navette qui nous emmène au départ. Bon timing, tout va bien. Je m'installe à côté de Yves dans le bus (les kikous sont partout !) et nous discutons un peu pendant l'heure de route.
Au départ à Fond-de-France, on nous annonce que la vague 1 partira avec 15 minutes de retard et que donc nous aussi, la vague 2, serons retardés. Pas bien grave, ça laisse un peu plus de temps pour papoter avec les copains et copines, et aller boire un thé surchargé en cannelle.
Samedi 21 août, la course
De Fond-de-France au Chalet de la Grande Valloire : km 14,6 - 2h57
5h45 top départ ! Je pars prudemment avec Franck et Baudouin, laissant Xavier, Benoit et Yves filer. Très vite Franck et Baudouin me distancent aussi. Je les vois au loin mais dès que ça monte un peu ils marchent naturellement plus vite que moi.
Cette piste qui monte gentiment pendant 5 km était l'échauffement, et la courte descente vers le Bréda (et la cascade du Pissou) est déjà plus sérieuse : assez raide avec des racines, elle m'attaque déjà un peu les cuisses... inquiétant.
Le Bréda, vers la cascade du Pissou |
Le Lac du Curtillard à Fond-de-France |
Sur la liaison en vallée jusqu'à La Ferrière, au bord du Lac de Curtillard, je retrouve Baudouin qui a dû s'arrêter pour soigner un bobo. Nous allons ensemble jusqu'au pied de la montée de la Valloire (l'énooooorme montée du mastodonte de la Valloire et ses 1700 mD+ !!!). Dès les premières rampes, encore pas trop dures, Baudouin me distance, normal. Je monte tranquillement, dans les 650 mD+/h ce qui me semble raisonnable, et ça passe bien jusqu'au 15e kilomètre où se trouve le ravito du chalet de la Grande Valloire. J'y arrive vers 8h45 et y reste moins de 10 minutes, le temps de grignoter du pain du saucisson et du fromage et de remplir mes deux bidons, ainsi que le troisième en réserve dans le sac, car la prochaine section est très longue et a priori sans point d'eau.
En arrivant sur le ravito du Chalet de la Grande Valloire |
Du Chalet de la Grande Valloire à Périoule : km 26,5 - 8h00
La deuxième moitié de l'ascension du Col de la Valloire est de plus en plus belle, de plus en plus raide, de plus en plus minérale, de plus en plus dure.
On passe le Lac Blanc, le Lac Noir, puis le Lac Glacé, somptueux. Et là c'est une tuerie ! Du névé, du raide, du gros caillou pas toujours stable, Belledonne dans toute sa splendeur !
Le Lac Glacé |
Le passage du Col de la Valloire (2750 m) offre un panorama grandiose et une belle satisfaction, mais ça m'a bien usé et j'ai mis 30 minutes de plus que mes prévisions les plus lentes pour y arriver. Je ne m'éternise donc pas (même si je serais bien resté là plus longtemps à profiter du soleil et de la vue) et me lance, doucement, dans la descente.
Le Col de la Valloire est à portée de main |
Au sud du Col de la Valloire |
Au nord du Col de la Valloire |
Dans la descente il y a toujours des gros cailloux (dont certains dévalent même la pente, pas glop), un passage bien raide, puis on arrive sur un long névé. Je le passe tant bien que mal debout en me stabilisant avec les bâtons. Ca va qu'il n'est pas trop pentu et que la neige n'est pas trop dure, mais il est long et je n'aime pas trop ça. Ceci dit ce n'est pas bien mieux lorsqu'on retrouve la terre ferme puisqu'on arrive dans la partie la plus raide de la descente qui n'a rien à envier à la moraine du Morétan. Mes cuisses et mon genou gauche commencent vraiment à couiner, les bras et le dos fatiguent aussi... et on n'a pas encore passé le Morétan !
Justement le voilà le Col de Morétan, enfin juste sa difficile partie finale puisque nous rejoignons le parcours de l'Intégrale sur le "replat" au-dessus du Refuge de l'Oule. C'est un peu plus haut que je fais la connaissance de Soffian un digne représentant de Kikouroù qui est engagé sur l'Intégrale, et qui se repose à l'ombre d'un rocher. Il a l'air fatigué (forcément, il en est à plus de 30h de course), mais j'ai l'impression de ne pas être plus frais que lui. Je n'ose pas trop lui parler de mon mauvais état physique alors que ça doit être tellement plus dur pour lui que pour moi, je lui souhaite surtout bon courage, et nous reprenons lentement notre ascension.
En haut c'est la grosse ambiance, les bénévoles chantent, Jean-Louis secoue sa cloche, et je franchis enfin le col à 12h30.
Le névé du Col de Morétan |
La descente, telle que je l'avais décrite en détail dans mon récit de l'an dernier, je la connais bien, et je sais que cette année elle ne passera pas aussi bien. Je ne me débrouille pas trop mal sur le névé, mais la raide moraine est difficile pour mes jambes déjà bien atteintes. En plus de devoir gérer la descente il faut parfois se retourner pour s'assurer de ne pas être percuté par un caillou lâché par des concurrents au-dessus, pas terrible. Ensuite je me traine un peu dans la section de blocs autour des lacs, et je refais même un petit arrêt pour parler avec Soffian quelques instants. Normalement je ne m'arrête presque pas entre les ravitos, sauf quelques secondes pour des photos par-ci par-là, aujourd'hui je m'arrête beaucoup trop souvent, je ne suis pas dans le coup.
La moraine |
Lac du Morétan suppérieur |
Lac du Morétan inférieur |
Bref ça repart et je déroule... euh non, je pioche, jusqu'au ravito de Périoule à 13h45, dans un cadre toujours aussi paradisiaque. Je bois du Coca et de la Sainte-Yorre, je prend un peu de salé, mais il n'y a pas de pain (juste des Tucs) et on est rationnés en fromage pour en laisser pour les autres. Du coup je vais boire de la soupe de petits pois, super bonne, et m'assoir un peu plus loin. J'ai vraiment besoin de récupérer. La pause va durer 20 minutes avant de remplir mes deux bidons et de repartir doucement.
De Périoule à Super-Collet : km 37,0 - 11h33
Je trottine un peu mais dès que ça redescend je repasse à la marche en subissant chaque choc. Je ne sens plus trop mon genou gauche mais la pause ne m'a pas permis de récupérer mes cuisses.
Le barrage du Carre |
Alors que Soffian me repasse puis me distance dans la descente, l'espoir de repartir dans de bonnes conditions de Super-Collet commence à s'amenuiser, mais je me convainc de ne pas trop y penser et d'attendre de voir où j'en serai après la terrible montée du Compas. Au pied de cette dernière je refais le plein d'eau car il fait toujours chaud dans cette montée. Et aujourd'hui c'est pire que l'année dernière, c'est raide, il fait très chaud, j'ai de la sueur dans les yeux, et je crois que j'ai fait au moins trois petits arrêts au cours de cette montée, quand je trouvais de l'ombre avec un petit courant d'air pour me rafraichir.
Lorsque j'arrive enfin en haut de cette purge, il est 16h15 et j'ai mis une heure pour monter les 460 mD+. Je suis de plus en plus à la rue physiquement et le chrono commence à m'inquiéter, ayant déjà compris que je ne pourrais pas prendre beaucoup de temps pour me reposer à Super-Collet.
Trêve de tergiversations, il reste encore la zone de la Pierre du Carre à parcourir, en balcon un peu vallonné, jamais vraiment roulant. J'y retrouve Soffian qui a l'air d'aller de mieux en mieux (ou c'est moi qui suis de moins en moins bien), et on tombe sur Aurélien, fidèle au poste avec sa bouteille de mojito ! (il fallait voir la tête de Soffian quand Aurélien lui en a proposé !). Une petite gorgée pour la forme et je repars sans traîner sur ce single agrémenté de quelques petites montées casse-pattes où les coureurs sont en petits trains, ce qui ralentit un peu ma progression déjà pas bien rapide.
La cabane au fond du jardin de la Pierre du Carre |
J'arrive à la base de vie de Super-Collet à 17h20, il reste 40 minutes avant la barrière horaire. Soffian va dormir un peu et moi je file chercher mon sac d'allègement après avoir bu un petit coup et récupéré une soupe de nouilles.
Super-Collet |
Ca fait un moment que mon esprit balance entre l'arrêt ici sachant que je suis cramé physiquement et que je n'aurai pas le temps de vraiment me reposer, et la tentative de continuer en mode "on verra bien" mais sans croire au miracle. N'ayant pas pris de décision je fais comme si j'allais repartir : remplissage des bidons, mise en charge de la montre et du téléphone, changement de t-shirt, etc... Mais je ne change pas de chaussettes ni de short par exemple, je n'ai pas vraiment le temps et ça ira comme ça... si je repars.
Le temps est passé vite jusqu'à 17h55 où l'annonce de la fermeture imminente est faite. A ce moment-là je crois que j'étais presque sur le point de me laisser repartir dans la course mais j'avais encore mes affaires à ranger dans le sac et un tube de poudre à mettre dans le bidon... oui mais si je ne repars pas, pas la peine de vider ce tube dans le bidon... Bon, je repars ou pas ? Je mets la poudre dans le bidon ou pas ? Oh puis non. Repartir dans cet état avec les serre-files aux fesses, pour au moins 7 heures de galère jusqu'à Val Pelouse où j'aurais certainement encore plus de mal à repartir, doutant même d'être capable de monter à Arpingon si ma condition physique empirait. Et puis j'avais entendu cette phrase qui me trottait en tête : "Il n'est pas possible d'abandonner hors d'un ravito". Alors si là je repars, et que je ne tiens pas le coup jusqu'à Val Pelouse, qu'est-ce que je vais devenir ? (questions qui me semble absurdes aujourd'hui évidemment...)
Bref, je suis resté là, j'ai notifié mon arrêt et demandé au speaker de faire une annonce pour trouver une voiture qui retournait à Aiguebelle. Deux minutes plus tard on m'interpelle, c'est Aurélien qui passait par là et qui me dit que sa voiture n'est pas loin et qu'il accepte de faire un détour pour me déposer. Merci beaucoup ! C'était un chouette moment ce retour en voiture, qui a retardé un peu la morosité de la déception qui me tombera évidemment dessus un peu plus tard.
Au final j'aurais fait 37 km pour 3200 mD+ en 11h33.
Après la course
Le lendemain matin à Aiguebelle, je commence à ranger mes affaires et en sortant la tête de ma tente vers 9h30 je tombe sur l'occupant de la tente voisine qui arrive, et qui n'est autre que Soffian ! Le monde de l'EB est petit... Il est donc finisher d'une traversée Intégrale épique, grand bravo à lui. Après avoir papoté un moment avec lui et Christian, je préfère ne pas rester sur place et rentrer à Lyon en train. Je manque ainsi de beaux moments de retrouvailles kikouresques mais je n'ai pas le coeur à refaire la course, la déception est maintenant bien là. Je n'ai pas les regrets de l'année dernière, cette fois c'est surtout la déception, de ne pas avoir été à la hauteur de mes ambitions, ni même à la hauteur de l'an dernier, alors que je pensais pouvoir faire mieux. Clairement ma préparation n'a pas été idéale j'ai payé le manque de montagne et de course de préparation. Peut-être que je n'étais pas non plus dans un aussi bon jour que l'an dernier (ou hormis le craquage mental, j'avais vraiment assuré physiquement). Et aussi l'ajout du Col de la Valloire a rendu le parcours plus difficile. Mais je n'imaginais pas payer tout ça aussi cher.
Je tiens à remercier tous les copains de Kikouroù qui m'enrichissent de leur expérience et leur sympathie à chaque rencontre, l'organisation et les super bénévoles, et aussi les quelques coureurs et une accompagnatrice qui ont vu ma vidéo de l'an dernier et qui sont venus m'en parler et m'encourager à aller au bout cette fois... ça ne l'a encore pas fait mais un jour j'y arriverai ! Peut-être pas l'année prochaine par contre, car il va falloir que je retrouve de la confiance sur des courses plus à ma portée et que j'arrive à hausser mon niveau de préparation, ce qui risque de prendre du temps.
L'important c'est qu'on fait un beau sport, et que la montagne est belle (même s'ils sont tous deux très exigeants) !
Pour la suite à court terme, je change totalement de braquet pour le Run In Lyon début octobre où je vais tenter de battre mon record sur semi-marathon, dix ans après mes débuts en course à pied.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire